OUVRIR UN SECOND FRONT

LA GRANDE-BRETAGNE ISOLÉE

En 1942, la situation militaire des Alliés est au plus bas : la France est occupée militairement par l’Allemagne; l’Afrique et la Méditerranée sont attaquées par l’Italie et toutes les colonies occidentales en Asie sont conquises par le Japon. Pendant ce temps, l’URSS est aussi envahie par l’Allemagne et des combats sanglants sont menés. Enfin, si les États-Unis entrent finalement en guerre, ils tardent à s’impliquer sur le front européen.

À partir de la France occupée, la Wehrmacht mène plusieurs attaques sur l’île de Bretagne qui subit de nombreux bombardements sur ses principales villes. Pour le premier ministre Winston Churchill, il devient impératif de mener une contre-attaque contre les troupes allemandes, de sorte à remonter le moral des Britanniques et des soldats canadiens, qui sont en garnison en Grande-Bretagne depuis 1940. Témoins impuissants des combats, beaucoup de ces hommes sont mécontents de ne pas pouvoir se battre.

Churchill veut aussi montrer à ses alliés, particulièrement à l’URSS, que la Grande-Bretagne peut encore combattre les forces de l’Axe. De fait, il lance l’initiative d’ouvrir un second front en Europe en organisant plusieurs raids sur les côtes occupées par l’Allemagne.

« Mais si je t’ai laissée pour partir à la guerre, ce n’était sûrement pas pour venir faire de la garnison en Angleterre. Et cette sensation d’assister en spectateurs en uniforme à une action qui ne va pas souvent à notre goût est déprimante. », André Vennat, Fusilier Mont-Royal, à sa femme au Québec.

« Qu’est-ce qu’une occupation militaire ? »

Une occupation militaire est lorsqu’une armée entre de force dans un autre territoire. En France, depuis 1940, l’Allemagne occupe militairement la moitié supérieure du pays et c’est l’armée qui gère les affaires de l’État. Dans la partie inférieure du pays, dit la « zone libre », c’est le régime de Vichy mené par Philippe Pétain qui administre le territoire (source : Bundesarchiv).

« Qu’est-ce qu’un raid ? »

Un raid est une manœuvre rapide qui vise à entrer dans un territoire ennemi, à détruire des objectifs précis et à collecter de l’information qui servirait à des opérations futures. À la différence d’un débarquement, le but du raid n’est pas de conquérir un territoire, mais plutôt de déstabiliser l’ennemi avant de retourner chez soi (source : Imperial War Museums).

Des soldats allemands au milieu de combats en France, 1940 (source : Bundesarchiv).
Des bâtiments en ruine après des combats, 1940 (source : Bundesarchiv).
Des réfugiés français en déplacement pour fuir l’avancée allemande (source : Bundesarchiv).

LES ORGANISATEURS DES RAIDS

Le Combined Operations Headquarters (COHQ), dont l’objectif est l’ouverture d’un second front, est fondé à la demande de Churchill. Réunissant des généraux de l’aviation, de la marine et des forces terrestres britanniques, le but du COHQ est d’organiser différents raids de sorte à instaurer un climat de terreur chez les forces allemandes. Après une série de petites frappes réussies, le COHQ commence l’organisation d’une grande opération amphibie sur les plages françaises de Dieppe. Planifiée d’abord sous le nom de code Rutter, l’opération se concrétise finalement sous le nom de Jubilee, après avoir été annulée une première fois.

« Jubilee marque, en effet, un changement d’échelle et de nature dans les raids, puisque l’on passe d’interventions mobilisant quelques centaines de commandos à une opération qui engage des milliers de soldats réguliers. », Béatrice Richard, historienne.

« Qu’est-ce qu’une opération amphibie ? »

Une opération amphibie est une manœuvre militaire qui réunit plusieurs corps de l’armée dans un objectif commun. Par exemple, un débarquement sur une plage mobilisant des membres de la marine et de l’infanterie est considéré comme une opération amphibie (source : Imperial War Museums).

Lord Louis Mountbatten (à droite) observe un exercice de débarquement sur une plage en Grande-Bretagne (source : Imperial War Museums).
Un soldat se repose sur un navire de débarquement après un entraînement sur l’une des plages britanniques, quelques mois avant le raid de Dieppe (source : Bibliothèque et Archives Canada).

LE PLAN

L’objectif principal du raid est de capturer le port de Dieppe, de recueillir de l’information sur les défenses allemandes en France, puis de retirer les troupes. L’opération Jubilee est à ce moment le raid le plus important de la guerre avec quelque 250 navires, 74 escadrilles aériennes et plus de 6000 soldats mobilisés. Si la grande majorité des soldats sont Canadiens, on retrouve aussi plusieurs Britanniques, Américains, Français et Polonais. C’est ainsi un assortiment incroyable de soldats, d’avions et de bateaux qui sont mobilisés pour le raid.

« Nous avons considéré comme un honneur d’avoir été choisis, nous les Fusiliers Mont-Royal et les autres régiments en étaient jaloux. Cela faisait trois ans que nous attendions le jour d’aller en manœuvres et l’action ne venait jamais. Quand nous avons enfin eu notre chance, nous étions contents. », Dollard Ménard, commandant des Fusiliers Mont-Royal.
Des soldats canadiens montent sur des navires de débarquement avec leur équipement pour un exercice en Grande-Bretagne, 1942 (source : Bibliothèque et Archives Canada).

Des soldats se rendent sur la plage de Dieppe, quelques heures avant l’attaque (source : Bibliothèque et Archives Canada).
Un employé du Royal Air Force devant un avion Douglas BOSTON. Fraîchement conçus durant la guerre, les Douglas sont beaucoup utilisés durant le raid (source : Bibliothèque et Archives Canada).
Les forces alliées traversent la manche en vue de l’attaque sur le port de Dieppe (source : Bibliothèque et Archives Canada).
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