LES VICTIMES DE JUBILEE
LES PERTES HUMAINES
Le raid de Dieppe est l’une des batailles les plus sanglantes pour l’armée canadienne, avec plus de 60 % de pertes humaines. La grande majorité des morts et des blessés surviennent sur la plage alors que les mitrailleuses allemandes abattent les hommes débarquant des bateaux. Avec presque aucune façon de se protéger des tirs ennemis, les soldats alliés ne sont que des cibles ouvertes pour les défenseurs. Pour plusieurs soldats alliés, la seule action possible est de se fondre parmi les cadavres et d’attendre la fin du raid.
ÊTRE FAIT PRISONIER
Lors du repli, plusieurs hommes tentent de rejoindre les navires au milieu des tirs allemands. Toutefois, la majorité des barques sont complètement détruites et les hommes doivent, bien souvent, nager jusqu’aux navires lourds longeant la plage. La nage est difficile et beaucoup d’hommes sont blessés et exténués par l’assaut et n’atteignent pas les bateaux. Bloqués sur la plage, ils sont ensuite arrêtés par les soldats de la Wehrmacht. Quelque 1 946 Canadiens sont ainsi capturés après le raid.
DANS LES CAMPS ALLEMANDS
Les survivants du raid sont immédiatement transportés dans plusieurs camps de prisonniers de guerre allemands. La grande majorité des Canadiens sont placés au camp Stalag 8B à Lamsdorf, mais d’autres se retrouvent aussi à l’Oflag 7B à Eichstätt ou au Stalag 9-C à Mühlhausen. Les Canadiens ne sont pas seuls dans ces camps qui abritent aussi des Britanniques, des Américains, des Néo-Zélandais, des Australiens, des Français, des Russes et plusieurs soldats d’autres nationalités.
Les conditions sont pénibles et plusieurs prisonniers allèguent que leur survie n’est due qu’aux paquets de nourriture, de médicaments et de vêtements de la Croix-Rouge. Sans cela, les hommes reçoivent souvent de petites rations peu nutritives contenant, parfois, de la nourriture pourrie. Si plusieurs des camps ont des hôpitaux militaires bien gérés, les quartiers des prisonniers laissent plutôt à désirer : les punaises de lit, les poux et les rats partagent les chambres avec les hommes.
Les gardes allemands ne posent pas les mêmes gestes sadiques que l’on retrouve dans les camps d’extermination ailleurs en Europe. Plusieurs soldats canadiens notent ainsi que les gardes sont relativement sympathiques avec eux. De fait, plusieurs échanges sont faits entre les prisonniers et les gardes. Cependant, l’attitude des Allemands change à l’égard des prisonniers slaves et la brutalité qu’ils démontrent à leur égard choque plusieurs Canadiens.
L’ère des menottes
Durant le raid de Dieppe, les Alliés avaient l’objectif de capturer des soldats allemands. En revanche, après les combats, les défenseurs allemands découvrent des documents alliés qui expliquent la façon de menotter un soldat ennemi. Apprenant cela, Adolf Hitler est personnellement scandalisé et ordonne que tous les survivants de Dieppe dans les camps de prisonniers doivent avoir les mains enchaînées en représailles. Choquant en retour les dirigeants alliés, plusieurs prisonniers allemands en Grande-Bretagne et au Canada sont aussi menottés. D’abord avec de la corde, puis avec des chaînes, les survivants de Dieppe subissent ce châtiment quotidiennement durant plusieurs mois (source : Jonathan F. Vance, The Journal of Military History, 1995).
« Quelle est la différence entre un camp pour prisonnier de guerre, un centre de mise à mort et un camp de concentration ? »
Dès l’arrivée au pouvoir des Nazis en 1933, les camps de concentration ont été mis en place pour emprisonner toutes les personnes considérées ‘ennemies du Reich.’ Ces détenus étaient exploités pour leurs mainsd’œuvre et étaient souvent soumis à la torture, à la famine, ainsi qu’à des expérimentations médicales.
Les centres de mise à mort apparurent en Europe de l’Est peu après l’invasion de l’URSS par l’Allemagne nazie en juin 1941. Ils étaient conçus spécifiquement pour exterminer de façon systématique un grand nombre de personnes, particulièrement les Juifs, les Roms et les Sintis.
Les camps de prisonniers de guerre (POW) étaient, quant à eux, conçus pour enfermer les officiers et le personnel militaires capturés par les nazis. Les conditions des camps pour les POW étaient généralement misérables et les travaux y étaient forcés pour certains prisonniers.
Section rédigé par Sara-Jane Vigneault, Conservatrice – Histoire pour le Musée de l’Holocauste Montréal.
LES ÉVASIONS
Dès le premier jour, plusieurs prisonniers tentent de s’évader des mains des Allemands. C’est le cas, par exemple, de Lucien Dumais qui saute hors d’un train en route vers les camps. Par la suite, il traverse toute la France occupée avec l’assistance de la Résistance et réussit à se rendre jusqu’en Grande-Bretagne où il poursuivra la guerre. Plusieurs s’échappent aussi par les hôpitaux militaires en France, souvent moins bien surveillés. Le capitaine John Runcie, du Queen’s Own Cameron Highlanders, réussit ainsi à s’échapper par la fenêtre d’un de ces hôpitaux, après avoir simulé une appendicite.
Rendus dans les camps, les survivants du raid planifient leurs évasions par différents moyens. Les hommes ne sont pas soumis aux travaux forcés, mais ils peuvent se porter volontaires pour travailler hors des camps. Il leur est donc plus facile de s’échapper. John H. Kimberley, du Royal Hamilton Light Infantry, fait plusieurs tentatives d’évasion en échangeant d’identité avec un autre prisonnier et, s’il est recapturé par deux fois, sa dernière tentative est la bonne et il réussit son évasion en septembre 1944.
Les hommes font preuve d’énormément d’imagination pour leurs évasions : déguisements de toute sorte, stratagèmes pour tromper les gardes, inventions improvisées pour enlever les menottes, etc. Cependant, c’est aussi grâce au courage de nombreux résistants et de civils hors des camps que ces hommes réussissent à retourner chez eux.