LE FRONT DOMESTIQUE

LA CONSCRIPTION

En juin 1940, le gouvernement canadien de Mackenzie King adopte la Loi sur la mobilisation des ressources nationales qui légalise la conscription de jeunes hommes pour le service militaire. Surnommés les « zombies » de façon dérogatoire, ces premiers conscrits ne peuvent pas être mobilisés à l’extérieur du pays. Ceux-ci sont plutôt responsables de protéger les côtes canadiennes en cas d’invasion allemande ou japonaise. Cependant, à mesure que la guerre avance, il devient improbable que ces soldats servaient une vraie utilité, selon certains.

King hésite longtemps à autoriser l’envoi des « zombies » à l’extérieur du Canada. En avril 1942, le gouvernement lance un plébiscite sur l’ouverture des balises de la conscription. Tentant d’apaiser les deux camps opposés, le premier ministre déclare alors : « la conscription si nécessaire, mais pas nécessairement la conscription ». Partout à travers le Canada, la population vote majoritairement en faveur de la conscription, à l’exception du Québec qui accuse le gouvernement fédéral de revenir sur ses promesses. La conscription ne fait pas non plus l’unanimité dans plusieurs régions francophones du Nouveau-Brunswick et de l’Ontario, de même que dans plusieurs communautés d’origines allemandes et ukrainiennes dans les Prairies.

Le premier ministre canadien Mackenzie King dépose son vote durant le référendum pour le plébiscite, le 27 avril 1942 (source : Bibliothèque et Archives Canada).

La campagne d’Italie et l’invasion de la plage de Normandie en juin 1944 poussent cependant le gouvernement à étendre la conscription en novembre 1944. En Italie, le manque de nouvelles troupes se fait particulièrement ressentir alors que plusieurs soldats blessés ou en détresse psychologique sont renvoyés au combat presque immédiatement après avoir été reçus par le personnel médical. En revanche, la conscription n’améliore pas les conditions au front et sa contribution outre-mer est très marginale avec moins de 2 500 soldats envoyés en Europe. Cela est sans mentionner les différentes émeutes, les désertions et les révoltes ouvertes de la part des conscrits avant leur envoi.

Le 23 mars 1939, des étudiants de l’Université de Montréal organisent une manifestation au Champ-de-Mars contre la mise-en-place de la conscription (source : Bibliothèque et Archives Canada).
An anti-conscription demonstration at Maisonneuve market in Montreal, March 1, 1942 (source : Library and Archives Canada).

L’INTERNEMENT DES ITALIENS AU CANADA

Après la déclaration de guerre de l’Italie au Canada, la communauté italo-canadienne tombe sous la loupe du gouvernement, en fonction des Lois sur les mesures de guerre. Le gouvernement de Mackenzie King désigne 31 000 personnes comme « enemy alien » – des personnes provenant d’une nation étrangère et estimées comme des menaces pour leur pays d’accueil. Les mesures du gouvernement, cependant, sont largement discriminatoires alors qu’elles incluent tous les Italo-Canadiens naturalisés depuis 1922. De fait, la journée même où la guerre est déclarée, le Canada commence à agir contre les Italo-Canadiens.

Partout à travers le pays, plusieurs membres importants de la communauté, soupçonnés d’entretenir des liens avec le régime mussolinien, sont touchés par des mesures discriminatoires. À ce moment, la majorité des Italo-Canadiens avaient abandonné leur soutien au gouvernement mussolinien, le voyant plutôt comme un régime autoritaire et impérialiste. En revanche, plusieurs groupes sociaux et communautaires gardent des liens superficiels avec le consulat italien, ce qui accentue la méfiance du gouvernement canadien. En Colombie-Britannique, par exemple, un club social demande à ses membres de signer une déclaration de loyauté envers Mussolini. Pour les autorités canadiennes, ces personnes représentent alors un danger potentiel. On retrouve ces mêmes situations ailleurs au pays, où les différentes Casa d’Italia sont soumises à des rafles et dont les membres sont arrêtés par la police.

Le 10 juin 1940, la police montréalaise fait un raid sur la Casa d’Italia et met en état d’arrestation plusieurs personnes (source : Bibliothèque et Archives Nationales du Canada).

Tous les Italo-Canadiens considérés comme étant des « enemy alien » doivent se rapporter aux autorités tous les mois. Entre 600 et 700 parmi eux sont mis en internement dans différents camps à travers le Canada. La majorité des Italo-Canadiens sont internés au camp de Petawawa en Ontario, mais certains sont aussi transférés aux camps de Kananaskis (Alberta) et de Fredericton (Nouveau-Brunswick). Si plusieurs internés réussissent à être libérés au courant de la guerre, en prouvant leur innocence ou par clémence, l’internement ne cesse officiellement qu’à la conclusion de la guerre en 1945. En 2021, le premier ministre Justin Trudeau a présenté des excuses officielles pour l’internement des Italo-Canadiens pendant la Seconde Guerre mondiale.

Prise en janvier 1940, cette photo montre des prisonniers à la porte du camp de Petawawa. Bien que les internés italiens n’arrivent au camp que plusieurs années plus tard, de nombreuses personnes d’origine allemande sont déjà emprisonnées au début de la guerre (source : BAnQ).

À gauche et en bas : La majorité des internés italiens sont placés au camp de Petawawa en Ontario.

Deux internés posent à l’intérieur du camp de Petawawa en 1941 (source : BAnQ).

LA FIN DE LA GUERRE

En avril 1945, les Alliés lancent une offensive générale sur les derniers éléments des armées allemande et italienne, encore installés dans le nord de la péninsule. Au même moment, divers groupes de partisans italiens se joignent à l’assaut et attaquent différentes positions tenues par les forces de l’Axe. C’est finalement le 29 avril, après la victoire de l’armée brésilienne à la bataille de Collecchio, que l’armée allemande signe officiellement sa reddition. La campagne d’Italie se conclut ainsi.

Comme l’ont noté certains historiens au fil des années, il est possible que la campagne d’Italie n’eût pas les effets espérés en comparaison des efforts déployés. Ouverte comme un second front avant un débarquement de grande ampleur en France, l’opération a toujours été perçue par les généraux alliés comme une campagne de diversion. Celle-ci est très longue, mais il est certain que ses conséquences sont positives et que ses effets sont beaucoup plus importants que la simple distraction de l’armée ennemie.

Effectivement, pour l’Allemagne, le début de la campagne annonce surtout le début de la fin. Cela n’en devient que plus clair à sa conclusion, lorsque le régime mussolinien est démantelé et que la péninsule est libérée. De fait, seulement une journée après la fin de la campagne, les Alliés encerclent complètement le régime nazi. Défait, Hitler se suicide dans son bunker le 30 avril 1945, et la guerre en Europe se termine presque aussitôt.

Le 4 juin 1944, l’armée canadienne entre à Rome et est accueillie par la population locale (source : Bibliothèque et Archives Canada).
Des tombes de soldats du Edmonton Regiment tués à Ortona (source : Bibliothèque et Archives Canada).

La ballade des D-Day Dodgers

La « Ballade des D-Day Dodgers » est une chanson écrite par le soldat britannique Harry Pynn qui décrit satiriquement les conditions de la campagne d’Italie. Depuis le débarquement de Normandie, plusieurs commentèrent que les combats en Italie était moins intense qu’ailleurs en Europe. En réponse, la chanson fut chantée partout au front pour y souligner la camaraderie des soldats mobilisés en Italie et pour souligner leurs batailles, leurs quotidiens et, surtout, leurs pertes.

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