AU-DELÀ LA LIBÉRATION

L’ARRIVÉE ALLIÉE

« Les Français sont assez accueillants et beaucoup nous acclament au milieu des ruines de leurs maisons. », comme le note le journal du Régiment de la Chaudière à leur arrivée au village de Bernières-sur-Mer, le 6 juin 1944.

Les Français voient l’arrivée des Canadiens comme le début de leur libération et, plus largement, de la fin de la guerre. De fait, partout où ils vont, les soldats canadiens sont acclamés comme des héros et se font approcher par des civils pour célébrer la victoire.

Les succès alliés n’enchantent pas tout le monde, cependant. Aux nouvelles du débarquement, plusieurs collaborateurs actifs du régime de Vichy s’enfuient de la Normandie et se réfugient en Allemagne. D’autres sont publiquement humiliés pour leur association avec les Allemands. Un soldat relate, par exemple : « J’ai vécu une expérience à Lille, en France. Il y avait des gens qui allaient dans ce village et qui coupaient les cheveux de ces femmes, vous savez, parce qu’elles avaient fréquenté les Allemands. Ils prenaient leurs cheveux et les coupaient, puis ils prenaient un rasoir et les rendaient chauves. » (Robert Bruce, membre du Corps royal d’intendance de l’Armée canadienne, Anciens Combattants Canada).

Un contingent du South Saskatchewan Regiment est accueilli par deux civils français, incluant un vétéran de la Grande Guerre, lors d’une avancée, le 20 juillet 1944 (source : Bibliothèque et Archives Canada).
Deux hommes discutent avec un soldat canadien à Bernières-sur-Mer, le 18 juin 1944 (source : Bibliothèque et Archives Canada).
Des camions blindés du 12th Manitoba Dragoons traversent la Seine, le 28 août 1944 (source : Bibliothèque et Archives Canada).

Frank Wong (1919-2013)

En raison des politiques discriminatoires de l’époque, Frank Wong n’était pas considéré comme un Canadien à sa naissance. Malgré cela, lorsque le Japon déclare la guerre au Canada, Wong décide très rapidement de s’enrôler dans l’armée pour prouver sa loyauté. Wong est ainsi l’un des rares Canadiens d’origine chinoise à être envoyés en France et à vivre le débarquement de Normandie.

« Je me souviens d’avoir traversé la campagne. C’était très excitant parce que, à chaque village que nous traversions, les gens sortaient avec des fleurs à la main et, quand nous nous arrêtions, ils apportaient du vin, des pâtisseries et des fruits pour que nous les mangions. »
– Frank Wong, mécanicien, Anciens Combattants Canada
Frank Wong devant la tour Eiffel, à Paris (source : Anciens Combattants Canada).

LE DÉBUT DE LA FIN

L’anticipation de la libération est très grande. Durant des semaines avant le débarquement, différentes rumeurs couraient quant à une invasion alliée. Plusieurs personnes cherchèrent des signes en ce sens.

Pour les Français, la réaction de leurs occupants face à ces rumeurs est très révélatrice du tournant qu’a pris la guerre. Divers problèmes d’organisation gênent la défense allemande, qui se retrouve complètement submergée en très peu de temps. Témoins de la débandade ennemie et encouragés par les nouvelles du débarquement, plusieurs civils comprennent ainsi que la fin de la guerre approche à grands pas.

Cependant, l’arrivée des Alliés n’est pas que positive pour la population française. En vue de la libération des côtes normandes, l’aviation américano-britannique procède à plusieurs bombardements des positions occupées par l’armée allemande. Malheureusement, beaucoup de ces positions sont des centres urbains, où plusieurs civils résident encore. Les bombardements alliés causent des ravages immenses et font énormément de victimes. De fait, la réaction française est souvent très mitigée, tandis que les libérateurs sont autant acclamés comme des héros que des destructeurs.

Une vieille femme et un enfant se mettent à l’abri des bombardements, le 8 ou 10 juin 1944 (source : Bibliothèque et Archives Canada).
Un howitzer britannique avance en support aux troupes canadiennes, en juin 1944 (source : Bibliothèque et Archives Canada).

LES REPRÉSAILLES ENNEMIES

L’armée allemande défend brutalement ses positions et, par le fait même, commet plusieurs crimes de guerre durant le débarquement allié. En effet, plusieurs des membres de la Wehrmacht mobilisés en France sont des vétérans du front de l’Est aigris par les combats ou sont des recrues issues des Jeunesses hitlériennes, fanatisées par un régime totalitaire. C’est le cas notamment du commandant allemand Kurt Meyer : déjà connu pour ses graves crimes de guerre en Europe de l’Est, il est envoyé en France où il combat l’invasion alliée.

Personne n’est épargné des exactions allemandes. Durant le débarquement, le 6 juin, la Wehrmacht exécute plusieurs résistants emprisonnés à Caen. Du 7 au 17 juin 1944, les SS, commandés par Meyer, assassinent 158 prisonniers de guerre canadiens en Normandie. Les massacres de Normandie sont ainsi parmi les pires crimes commis contre des militaires canadiens durant la guerre. Les civils ne sont pas non plus épargnés, tandis que plusieurs villages sont attaqués à travers le pays. C’est le cas, notamment, d’Oradour-sur-Glane, où 643 civils français sont assassinés, le 10 juin 1944.

Une maison en feu, quelque part en France en juin 1944 (source : Bundesarchiv, Bild 101I-720-0329-32 / Koll / CC-BY-SA 3.0).
Des casques de soldats alliés empilés au moment où des prisonniers de guerre sont rassemblés par l’armée allemande, en juin 1944. (source : Bundesarchiv, Bild 101I-720-0329-05 / Koll / CC-BY-SA 3.0).
Source : Bibliothèque et Archives Canada.

LÉO MAJOR

LA PERTE DE SON OEIL

Le 8 juin, le soldat Léo Major est en patrouille aux environs de Caen lorsqu’il confronte un groupe de quatre soldats allemands. Durant l’escarmouche, une grenade de phosphore explose proche de Léo et le blesse à l’œil gauche. Alors qu’il lui est recommandé de retourner au pays, il aurait répondu qu’il n’a besoin que de son œil droit pour tirer. Son argument parvient à convaincre le médecin qui autorise sa mobilisation au front. Le régiment capture environ 60 prisonniers allemands ce jour-là.

Des soldats du Régiment de la Chaudière se reposent dans un fossé, le 8 juin 1944.
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