La Maison des Canadiens

Connaissez-vous la Maison des Canadiens ? En plus de son allure exceptionnelle, elle est aussi le premier point atteint par les troupes canadiennes débarquées en Normandie le 6 juin 1944.

Cet article fut publié dans le cadre de notre exposition sur le Jour J : Quand le jour se lève.
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Surplombant la plage longeant Courseulles-sur-Mer se trouve une large maison. Ou plutôt, deux maisons jumelées pour former un plus large bâtiment ! Le bâtiment a été construit en 1928 dans un style très normand : des murs couleur clairs, une toiture foncée et un colombage élégant. Et avec sa vue directe sur la plage, qui se trouve à seulement quelques mètres, elle offre une vue exceptionnelle sur la Manche ! Aujourd’hui, la maison offre toutefois un autre attrait : elle fut une position stratégique primordiale durant le débarquement de Normandie.

La maison des Hoffer

En 1936, la famille Hoffer achète la partie gauche de la maison qu’elle habite jusqu’à l’arrivée de la Wehrmacht en 1940. Les Allemands ordonnent de détruire plusieurs des maisons établies le long des côtes de sorte à ne pas entraver leur champ de vision en cas d’une invasion ennemie. Huit maisons sont ainsi rasées à Courseulles-sur-Mer, mais la maison des Hoffer est miraculeusement épargnée. Selon l’histoire familiale, ils ont été forcés de donner la maison à un officier allemand et à ses subalternes, ce qui aurait peut-être sauvé la maison. Les Hoffer eux-mêmes durent forcer à fuir leur maison vers Le Havre durant la guerre. 

La maison survécut ainsi à l’occupation allemande et aux bombardements alliés en 1944, mais fut le théâtre d’intenses combats lors du débarquement du 6 juin. En effet, du fait de sa taille et de sa position, la maison des Hoffer fut la cible principale de la tête de pont des Alliés.

Le plan de déploiement des Queen's Own Rifles of Canada sur la plage Juno. La Maison des Canadiens est dans le cercle rouge (source : The Queen's Own Rifles of Canada Regimental Museum and Archive).

La Maison des Canadiens

La compagnie B des Queen’s Own Rifles débarque sur la plage Juno vers 8h15. Selon le journal de guerre du régiment, les soldats rencontrent une résistance ennemie farouche, mais réussissent rapidement à se rendre dans la maison des Hoffman. Plusieurs soldats allemands se réfugient toutefois dans la cave de l’imposant bâtiment et cela prend du temps à les déloger définitivement.

Comme le décrit l’ancien propriétaire de la maison à la presse canadienne, des années plus tard : « Ce sont eux qui ont libéré la maison […]. À peu près une demi-heure plus tard arrivent les soldats canadiens-français du Régiment de la Chaudière. Puis, en fin d’après-midi du 6 juin, les blindés du fort Garry Horse. Après avoir chassé les Allemands, les Canadiens ont établi ici un poste de transmission. »

Effectivement, à 9h le matin la compagnie établit son poste de commandement à l’intérieur et l’utilise comme base pour tout le reste de l’opération.

Des soldats du North Nova Scotian Highlanders et du Highland Light Infantry of Canada débarque d'un LCI(L) le 6 juin 1944. Ce débarquement s'est fait après que la plage fut sécurisée et certains soldats transportent des vélos. La maison du Queen's Own Rifles est visible en haut à droite de la photo (source : Bibliothèque et Archives Canada).

Conclusion

Lorsque la famille Hoffer reprend la maison, ils ne se rendent pas compte d’abord que celle-ci est devenue un lieu symbolique important pour les soldats canadiens. En effet, c’est seulement en 1984, aux commémorations du quarantième de la bataille et lorsque des vétérans se rendent en pèlerinage à la maison, que les Hoffer réalisent sa signification pour eux. Comme son ancien propriétaire, Hervé Hoffer, l’explique : « Nos parents parlaient très peu du débarquement […] Les premières personnes à qui nous avons ouvert nos portes sont des anciens combattants. »

C’est ainsi que la Maison devint un lieu de mémoire important pour les vétérans qui la virent comme une marque importante de la guerre qu’ils commencèrentsur les plages. Pour les citoyens français, la Maison devint aussi un symbole de leur libération et du sacrifice mené par les soldats canadiens et, plus particulièrement, du Queen’s Own Rifles. En retour, les propriétaires ont fait la tradition d’allumer des chandelles sur les plages à chaque premier juin, en l’honneur des libérateurs et des disparus.

Encore aujourd’hui, la Maison est un lieu de commémorations importantes et ce fut avec grande joie des propriétaires que 2 500 personnes se sont rassemblées pour donner leurs hommages lors des célébrations des 80 ans du débarquement de Normandie, en 2024.

Article rédigé par Julien Lehoux pour Je Me Souviens.

Sources :