Cet article fut publié dans le cadre de notre exposition sur la bataille de Hong Kong : Des chances impossibles.
Consulter notre exposition pour en apprendre davantage sur le sort des soldats canadiens envoyés défendre la colonie !
Pour plusieurs personnes à l’époque, la bataille de Hong Kong était déjà perdue d’avance. Après tout, le premier ministre britannique Winston Churchill lui-même aurait fameusement déclaré à son État-Major « Il n’y a pas la moindre chance de tenir Hong Kong ou de le soulager. Il est très imprudent d’augmenter les pertes que nous devrions subir là-bas ». Les troupes canadiennes envoyées à Hong Kong, qui constituent la Force C, visaient alors à renforcer la colonie contre toute attaque japonaise. Malheureusement pour les défenseurs, les prédictions se retrouvent à être vraies et l’assaut de l’armée japonaise est, finalement, insurmontable.
Ce n’est pas dire que les soldats canadiens, et l’ensemble des défenseurs de la colonie ne firent pas preuve de courage lors des combats. En effet, autant les Winnipeg Grenadiers que les Royal Rifles of Canada se démarquent et 80 ans après la fin de la bataille, on vous invite à explorer quelques-uns de leurs faits d’armes. Ainsi, pour cette première partie d’une minisérie en deux articles qui commémorent la bataille de Hong Kong, on vous emmène autour des combats cruciaux du col de Wong Nai Chung qui eurent lieu du 19 au 21 décembre.
Le col de Wong Nai Chung
Hong Kong est principalement constitué de la péninsule de Kowloon, des Nouveaux-Territoires et de l’île principale. Le 8 décembre 1941, la 38e division, surnommée la « Division Marécage », de la 23e armée de l’Armée impériale japonaise, franchit les Nouveaux-Territoires et force rapidement les défenseurs britanniques et sikhs à reculer. Contrairement à la majorité des Alliés à Hong Kong, les soldats de la 38e division étaient des vétérans de la Deuxième Guerre sino-japonaise (1937-1945), ayant participé à plusieurs missions de garnison là-bas. La bataille de Hong Kong constitue leur premier engagement d’envergure, mais les soldats de la 38e division seront ensuite mobilisés partout à travers le Pacifique jusqu’à la fin de la guerre.
Avec la prise des Nouveaux-Territoires et de la péninsule de Kowloon, l’armée japonaise se tourna éventuellement sur l’île principale de Hong Kong à partir du 13 décembre. Évidemment, la perte de l’île signifiait pour les Alliés une défaite totale et il était ainsi primordial de la défendre coûte que coûte. Le col de Wong Nai Chung, au centre de l’île, se retrouvait alors à être la position stratégique de grande importance. Quiconque tenait Wong Nai Chung détenait un avantage important.
Les combats
Le Major-Général britannique Christopher Maltby était chargé de toutes les troupes alliées durant la bataille. Après avoir été repoussés de leurs positions sur le continent, les défenseurs se sont divisés en deux brigades stratégiques pour repousser l’ennemi. La brigade de l’Est était commandée par l’officier britannique Cedric Wallis et inclut notamment le 5/7 th des régiments Rajput, des troupes de volontaires locaux et les Royal Rifles of Canada. Quant à la brigade de l’Ouest, c’est le Canadien John K. Lawson qui avait à sa charge les troupes britanniques, punjabies et les Winnipeg Grenadiers. Le poste de commandement de Lawson se trouvait directement au col de Wong Nai Chung et de fait, ce sont les Winnipeg Grenadiers qui étaient chargés de le protéger.
Les troupes japonaises s’introduisent sur l’île durant la nuit du 18 décembre et neutralisent rapidement les défenseurs. La brigade de l’Est tente, en vain, de repousser les Japonais, mais ceux-ci réussissent à capturer chacune de leurs positions et à avancer profondément dans l’île. En quelques heures seulement, les troupes sous Wallis sont forcées de reculer jusqu’au village de Stanley, tout au sud.
Lawson, sentant l’ennemi s’approcher, envoie les Winnipeg Grenadiers défendre trois positions importantes : à Jardine’s Lookout, au Mont Butler et à la route menant directement au col. De fait, cela ne fut pas long avant que les soldats japonais rencontrent les défenseurs canadiens. C’est peu dire que les combats sont intenses et d’énormes pertes sont comptées des deux côtés. Au Mont Butler, les va-et-vient des troupes rappellent les combats des tranchées de la Première Guerre mondiale, à l’exception près que les soldats combattent sur un terrain montagneux et extrêmement difficile à bouger.
Le sacrifice de John R. Osborn
Le 19 décembre, une compagnie des Winnipeg Grenadiers parvient à reprendre le mont, mais la riposte japonaise est farouche et encore une fois, les Canadiens doivent reculer. Le sergent-major John R. Osborn est chargé de mener la retraite. Alors que ses hommes tentent de quitter le feu nourri de l’adversaire, Osborn resta en arrière et riposta du mieux qu’il put tout en dirigeant de temps à autre des camarades égarés. Cependant, les forces japonaises maintinrent leurs avances et lancèrent des grenades sur la petite compagnie. Dans un acte héroïque, Osborn se jeta sur l’une d’eux et se sacrifia pour sauver ses camarades. Tel était l’intensité des combats.
Les Japonais réussirent à encercler aisément les défenseurs et il devint très difficile pour ceux-ci de se coordonner face aux assauts incessants. Si les Alliés tentent vaillamment de garder leurs positions, la fureur des assauts de la 38e division empêche toute reprise définitive de leurs locations. Le 19 décembre, le col est définitivement saisi par les Japonais. Ils contrôlent ainsi la position centrale de l’île.
Les défenseurs vont tenter plusieurs fois de reprendre le col et plusieurs contre offensives sont organisées avec les Winnipeg Grenadiers et les Royal Rifles joignant les assauts à chaque fois, mais c’est sans effet. Le 21 décembre, Maltby tente une riposte finale avec quatre pelotons d’hommes, mais l’attaque est annulée lorsque les Alliés aperçoivent le nombre impressionnant de Japonais en face d’eux. Le col est perdu pour de bon.
La fin
La perte du col de Wong Nai Chung signifie le début de la fin pour les défenseurs de la colonie. Le col était une position primordiale pour les défenseurs, reliant toutes les artères de l’île ensemble. Ainsi, pour les Alliés, perdre Wong Nai Chung indiquait que la bataille semblait perdue pour de bon. Comme de fait, la reddition est sonnée quelques jours après cette défaite.
Ce serait faux de dire que les défenseurs n’ont pas continué à combattre vaillamment jusqu’à la reddition finale. Personne ne succomba à la panique et les soldats alliés continuèrent à défendre la colonie du mieux qu’ils le pouvaient, malgré un ennemi largement supérieur. L’hôtel de Repulse Bay fut, par exemple, le théâtre de combats charnières entre les Alliés et les Japonais et permit de retarder quelque peu leurs assauts.
Ultimement, cependant, c’est les combats finaux au village de Stanley qui marquent pour de bon la fin de cette terrible bataille. On vous invite alors à lire la deuxième partie de cet article !
Article rédigé par Julien Lehoux pour Je Me Souviens. Cet article est la première partie d’une série de deux articles sur les combats importants menés lors de la bataille de Hong Kong. Pour lire la deuxième partie sur l’assaut final au village de Stanley, vous pouvez cliquer sur le lien ici.
Sources :
- « Canadiens à Hong Kong », Anciens combattants Canada/Veterans Affairs Canada.
- « Le Canada et la bataille de Hong Kong », L’Encyclopédie Canadienne/The Canadian Encyclopedia.
Pour une approche plus académique, on vous suggère les ouvrages suivants :
- Franco David Macri, « Canadians under Fire: C Force and the Battle of Hong Kong, December 1941 », Journal of the Royal Asiatic Society Hong Kong Branch, vol. 51, 2011, pp. 237-256.
- Nathan M. Greenfield, The Damned: The Canadians at the Battle of Hong Kong and the POW Experience, 1941-45, Toronto, Harper Collins Publishes, 2010, 462 p.
- Tony Banham, Not the Slightest Chance: The Defence of Hong Kong, 1941, Hong Kong, Hong Kong University Press, 2003, 452 p.